George Sand, Oeuvres de George Sand (1854) “ Mais quepuis-je faire devant une vertu si calme et si compatissante? Le dernier des lâches tomberait à genoux devant toi, et tu sais que je suis un honnête homme ; j'aurai du coeur. Adieu, Fernande; adieu, ma soeur chérie; adieu, mon seul et dernier amour; je deviendrai ce qu'il plaira à Dieu; je guérirai ou je mourrai. Il ne s'agit pas décela; l'important, c'est que tu restes heureuse et pure; je partirai avec celle idée, et elle me soutiendra. Il faut que vous me pardonniez un vol que je vous ai fait : le bracelet que vous m'avez jeté par la fenêtre, un ” [↩︎] Source : Gallica ▶︎
George Sand, L’Homme de neige “ Voyons, malheureux, est-ce là ton idée ? — Oui, c’est ma résolution, répondit Christian, j’en ai assez. J’ai cru que je pourrais aller plus longtemps, mais l’incognito prolongé me fatigue comme une puérilité indigne d’un homme sérieux. Il faut que je trouve le moyen de voyager sans mendier. J’ai bien cherché déjà. C’est un grand problème à résoudre pour qui n’a rien. L’homme qui se fixe trouve toujours du travail ; celui qui veut marcher est bien embarrassé aujourd’hui. Dans l’antiquité, monsieur Goefle, voyager signifiait conquérir la terre au profit de l’intelligence humaine. ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, Oeuvres de George Sand (1838) “ Comme une belle fleur, née le matin sur les rochers, et déjà battue des vents avant de s'épanouir, il penchait sa tête pâle sur son sein, et son sourire avait une langueur qui n'était pas de son âge. Aussi, l'intimité si caressante et si sereine de Valentine, le dévouement si prudent et si soutenu de Bénédict, commencèrent pour lui une nouvelle ère. Il se sentit épanouir dans cette atmosphère plus favorable à sa nature. ” [↩︎] Source : Gallica ▶︎
George Sand, Oeuvres de George Sand… “ La pauvre Jeanne fondit en larmes, et, tout entière à sa douleur, elle ne s’aperçut pas que Léon était assis tout près d’elle sur le sopha, qu’il l’entourait de ses bras, prêt à la serrer sur sa poitrine, et que son souffle brûlant effleurait dans l’obscurité son cou d’albâtre penché sur son sein. — Chère Jeanne, lui dit-il d’une voix tremblante, tu as raison de plaindre Guillaume au lieu de le condamner. Il est assez malheureux de ne pouvoir se faire aimer de toi. Quel homme ne serait amoureux de la plus belle et de la meilleure de toutes les filles ? ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, Les Beaux Messieurs de Bois-Doré “ Il se croit un homme et veut se marier, à l'âge où il n'aurait besoin que du fouet.Ces dures paroles achevèrent de désoler Mario; elles fâchèrent sérieusement le marquis.—Mon voisin, dit-il à de Beuvre, je vous trouve en veine de duretés superflues. Le fouet n'entre pas dans ma méthode avec un enfant qui a marqué le cœur d'un vaillant homme. Je n'ignore point qu'il ne se doit marier que dans plusieurs années; mais je croyais me rappeler que notre Lauriane ne se voulait point marier elle-même avant sept ans, à partir du jour où, en cette même chambre, l'an passé, elle me donna un gage... ” [↩︎] Source : Gutenberg ▶︎
George Sand, Lélia “ Couché sur l’herbe fraîche et luisante qui croit aux marges des courants, le poëte oubliait, à contempler la lune et à écouter l’eau, les heures qu’il aurait pu passer avec Lélia; car, à cet âge, tout est bonheur dans l’amour, même l’absence. Le cœur de celui qui aime est si riche de poésie, qu’il lui faut du recueillement et de la solitude pour savourer tout ce qu’il croit voir dans l’objet de sa passion, tout ce qui n’est réellement qu’en lui-même.Sténio passa bien des nuits dans l’extase. Les touffes empourprées de la bruyère cachèrent sa tête agitée de rêves brûlants. ” [↩︎] Source : Gutenberg ▶︎
George Sand, Le Piccinino “ La princesse ne connaissait pas Michel; elle ne l'avait jamais vu, il n'était point encore à Catane lorsqu'elle avait pris le scapulaire de Mila pour l'échanger contre cette riche monture. Il est difficile de croire qu'une femme puisse s'éprendre d'un homme à la seule vue de la couleur de ses cheveux. Michel eut beau chercher, il ne trouva que cette explication peu satisfaisante pour son ardente curiosité: la princesse avait peut-être aimé une personne dont les cheveux étaient absolument de la même nuance et de la même finesse que ceux de Michel. Elle les portait dans un médaillon. ” [↩︎] Source : Gutenberg ▶︎
George Sand, Lélia “ Vous êtes si froid, votre cœur est si vieux, ami, que vous parlez de fuir Sténio comme s’il s’agissait de quitter cette ville pour une autre, ces hommes d’aujourd’hui pour les hommes de demain, comme s’il s’agissait pour vous, Trenmor, de me quitter, moi Lélia?Je le sais, vous avez touché le but, vous avez échappé au naufrage, vous voilà au port. Nulle affection en vous ne s’élève jusqu’à la passion, rien ne vous est nécessaire, personne ne peut faire ou défaire votre bonheur, vous en êtes vous-même l’artisan et le gardien. ” [↩︎] Source : Gutenberg ▶︎
George Sand, Consuelo “ L’artiste dépérit et s’éteint dans l’obscurité, comme le penseur s’égare et s’exaspère dans la solitude absolue, comme tout esprit humain se détériore et se détruit dans l’isolement et la claustration. Allez donc au théâtre, Consuelo, si vous voulez, et subissez-en l’apparente flétrissure avec la résignation d’une âme pieuse, destinée à souffrir, à chercher vainement sa patrie en ce monde d’aujourd’hui, mais forcée de fuir les ténèbres qui ne sont pas l’élément de sa vie, et hors desquelles le souffle de l’Esprit saint la rejette impérieusement. ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, Mademoiselle Merquem (1868) “ Je me demandai si le culte exalté que j’avais voué à Célie n’était pas l’ouvrage de mon orgueil, et si, vanité pour vanité, celle de Montroger n’était pas plus humaine et plus digne d’intérêt que la mienne. Ceux qui ont aimé me pardonneront ces défaillances. L’amour a pour complément la passion, qui semble pourtant le combattre ; c’est la soif ardente du blessé qui aspire à la vie et qui ne peut s’abstenir de boire l’eau qui le tue. Je revenais brisé vers le village quand je vis venir sur le sentier, Montroger avec Stéphen, mademoiselle Merquem et Bellac. ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, Évenor et Leucippe “ Et quand la dive instruisait Evenor et Leucippe, elle leur disait:—Dieu est ce que vous ne pouvez pas aimer par l'instinct. Il faut toute l'étendue de vos aspirations, toute la force de vos esprits, toutes les facultés supérieures qui sont en vous dans vos plus doux moments de joie et de tendresse, pour vous pénétrer de sa présence et de son amour. Vos sens ne peuvent l'embrasser, votre mémoire ni votre imagination ne peuvent se le représenter, car il n'a pas une forme déterminée que vos organes puissent saisir. ” [↩︎] Source : Gutenberg ▶︎
George Sand, Horace “ Depuis qu'Horace vivait avec Marthe, il avait eu soin d'écarter toutes ses connaissances, à la réserve de deux ou trois amis qui ne pouvaient lui inspirer de jalousie, et qui avaient pour lui cette admiration respectueuse qu'un jeune homme intelligent et présomptueux inspire toujours à une demi-douzaine de camarades plus simples et plus modestes. On peut même dire, en passant, que la principale cause de l'orgueil qui ronge la plupart des jeunes talents de notre époque, c'est l'engouement naïf et généreux de ceux qui les entourent. ” [↩︎] Source : Gutenberg ▶︎
George Sand, André “ Non, il n'est pas fou, belle Henriette; il est trop sage au contraire. Il n'ose pas seulement trouver une femme jolie. Fiez-vous à ces amoureux-là; dès qu'ils ont secoué leur mauvaise honte, ce sont les plus tendres amants du monde. Mais ne croyez pas que je parle de vous, non, mille dieux! Si vous voulez avoir pitié de quelqu'un ici, j'aime autant que ce soit de moi que de lui. Je veux dire, en deux mots, qu'André deviendrait amoureux s'il voyait Geneviève; c'est tout à fait la beauté qu'il aimera. ” [↩︎] Source : Gutenberg ▶︎
George Sand, Mont-Revêche (1853) “ Quand elle est de bonne humeur, elle est toute jeune et assez gentille, qu’on dit. Quand elle est en colère, elle est vieille et laide comme un diable. Mais, quand elle veut faire mourir quelqu’un, et qu’elle tire son masque, on voit une figure de mort desséché, et il faut partir dans la huitaine. Voilà ce qu’on dit ; mais c’est des fameuses bêtises. — Tout cela est très-conforme à la version d’Éveline, dit Thierray en mettant pied à terre ; car on était entré dans la cour du château. ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, François le Champi “ Un homme qui fait tout cela sans craindre d’être ridicule ou maudit, et qui réussit à n’être ni l’un ni l’autre, est hors de toute atteinte ; il peut tout risquer et tout espérer. Aussi les plus savantes résistances cédaient à cette considération que Raymon était amoureux comme un fou quand il s’en mêlait. Dans le monde, un homme capable de folie en amour est un prodige assez rare, et que les femmes ne dédaignent pas. Je ne sais comment il fit ; mais, en reconduisant madame de Carvajal et madame Delmare à leur voiture, il réussit à porter la petite main d’Indiana à ses lèvres. ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, Pauline “ Cependant, lorsqu’au coup de midi l’aveugle s’éveilla, Pauline savait toute la vie de Laurence, même ce qui ne lui avait pas été raconté, et cela plus que tout le reste peut-être ; car les personnes qui ont vécu dans le calme et la retraite ont un merveilleux instinct pour se représenter la vie d’autrui pleine d’orages et de désastres qu’elles s’applaudissent en secret d’avoir évités. C’est une consolation intérieure qu’il leur faut laisser, car l’amour-propre y trouve bien un peu son compte, et la vertu seule ne suffit pas toujours à dédommager des longs ennuis de la solitude. ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, Les Maîtres sonneurs “ Je ne crois pas à un bien tendre cœur sous une si rude fierté, répondit Brulette; je suis, à présent, comme Thérence: un peu de tendresse m'attire plus qu'un beau savoir; mais j'ai pardonné, et si ma pitié n'est pas aussi grande que Joseph la réclame en son langage, c'est parce que je lui connais une consolation dont mon oubli ne le privera point: c'est l'estime que les autres et lui-même feront de ses talents. Si Joseph n'y tenait pas plus qu'à l'amitié, il n'aurait pas la langue muette et l'œil sec devant les reproches de l'amitié. On ne sait bien demander que ce dont on a grand besoin. ” [↩︎] Source : Gutenberg ▶︎
George Sand, La Confession d’une jeune fille (1865) “ Pendant quelque temps je ne vis plus rien qu’un nuage impénétrable sur mon avenir. Une âme forte comme celle de Frumence rêvait l’amour et le surmontait. Une âme grande comme celle de Jennie l’ajournait sans y rêver. Ce tyran des cœurs était donc bien débonnaire et bien facile à tenir en bride, pour peu que l’on fût un esprit bien trempé, et j’avais la prétention de n’être au-dessous de personne. XXXIII C’est alors que, tout en causant de Frumence, de Jennie et même de l’imbécile Galathée, à nos moments perdus, nous en vînmes insensiblement, Marius et moi, à parler de nous-mêmes. ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, Lélia “ Les soins de Naam ont guéri la blessure d’Orio en peu de jours. La mort d’Ezzelin paraissait constatée ; nulle part on n’a retrouvé aucun indice qui ait pu faire croire à son salut ; s’il était possible d’échapper à la férocité impétueuse des pirates, il ne le serait pas d’échapper à la haine réfléchie de Soranzo. Giovanna ne se plaint plus ; elle ne paraît plus souffrir ; elle ne se penche plus les soirs à sa fenêtre ; elle n’écoute plus les bruits vagues de la nuit. Quand Naam lui chante les airs de son pays en s’accompagnant du luth ou de la mandore, elle n’entend pas, et sourit. ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, Elle et Lui “ L'homme qui les demande avilit celle qu'il aime. Il exige d'elle une lâcheté, en même temps qu'il la souille dans sa pensée, en associant son image à celle de tous les fantômes qui l'obsèdent. Oui, Thérèse, tu as raison: il faut travailler soi-même à entretenir la pureté de son idéal, et, moi, je m'évertue sans cesse à le profaner et à l'arracher du temple que je lui avais bâti!Il semblait qu'après de telles explications, et lorsque Laurent se disait prêt à le signer de son sang et de ses larmes, le calme dût renaître et le bonheur commencer. ” [↩︎] Source : Gutenberg ▶︎
George Sand, Simon “ Le mariage de Simon Féline et de Fiamma Faliero fut célébré à la fin du printemps, dans la petite église où ils avaient dit une si fervente prière le jour de leurs mutuels aveux. À côté de ce beau couple, on vit l’aimable Bonne s’engager dans les mêmes liens avec le jeune médecin qui l’aimait, et qu’elle ne haïssait pas, c’était son expression. Le comte de Fougères assista au mariage avec une exquise aménité. Jamais on ne l’avait vu si empressé de plaire à tout le monde. Heureusement pour lui, cette noce se passait en famille, au village, et sans éclat, dans la maison Parquet. ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, Le Piccinino “ Signora Mila, faudra-t-il que votre père s'y mette aussi?—Père, répondit Mila, vermeille de plaisir, de fierté et de chagrin tout ensemble, écoutez-moi au lieu de me railler, car j'ai besoin de garder ma dignité sauve, moi! Une femme n'a rien de plus précieux, et un homme, un père même, ne comprend jamais assez combien nous avons le droit d'être susceptibles. Je ne veux pas être aimée à demi, je ne veux pas servir de pis-aller et de remède à une passion mal guérie. Je sais que maître Magnani a été longtemps amoureux, et je crains qu'il ne le soit encore un peu, d'une belle inconnue. ” [↩︎] Source : Gutenberg ▶︎
George Sand, Souvenirs de 1848 (1880) “ Ce n'est pas la première fois qu'une notable portion du peuple demande l'association libre et l'encouragement de l'État pour son principe de fraternité, l'État n'a ni le droit ni l'envie de s'y opposer. La masse, étrangère à l'adoption de certaines définitions, n'avait pas encore eu la pensée de voir .dans cette sorte de grande secte née sous le souffle de la République, une menace à sa liberté de conscience et à ses habitudes d'organisation. ” [↩︎] Source : Gallica ▶︎
George Sand, Les Maîtres sonneurs (1853) “ On buvait, chantait et dansait à chaque repos. Il n’y avait plus moyen pour Thérence de se tenir à l’écart, et elle accepta mon bras pour aller au-devant du cortége, tandis qu’Huriel y menait Brulette. Ma tante se chargea du petit, et le grand bûcheux, entraînant le carme, le décida aisément à se divertir en bonne compagnie. Le gars qui jouait le personnage du jardinier, ou, comme on dit encore chez nous, du païen, sur la civière, était orné d’une manière qui étonnait bien le monde. ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, Oeuvres de George Sand (1838) “ Mais, écoutez, j'ai encore une raison pour désirer que vous épousiez Edmée. — Laquelle, bon monsieur Patience? — C'est que ce La Marche ne lui convient pas. Je le lui ai dit, ouidà ! et à lui aussi, et à l'abbé, et à tout le monde. Ce n'est pas un homme cela. Cela sent bon comme tout un jardin; mais j'aime mieux le moindre brin de serpolet. — Ma foi! je ne l'aime guère non plus, - - -- moi. Mais si ma cousine l'aime? hein! Patience! — Votre cousine ne l'aime pas. Elle le croit bon, elle le croit véritable; elle se trompe, et il la trompe, et il trompe tout le monde. ” [↩︎] Source : Gallica ▶︎
George Sand, Consuelo “ Pour une grande artiste comme vous l’êtes, je vous trouve trop sensible aux choses d’ici-bas, lui dit Joseph. Il me semble qu’il faut à l’artiste un peu plus d’indifférence et d’oubli de tout ce qui ne tient pas à sa profession. On disait dans l’auberge de Klatau, où j’ai entendu parler de vous et du château des Géants, que le comte Albert de Rudolstadt était un grand philosophe dans sa bizarrerie. Vous avez senti, signora, qu’on ne pouvait être artiste et philosophe en même temps ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, La Ville noire “ Quand une idée noire s’empare d’un cerveau logique, elle trouve toujours à s’y fonder sur des inductions désespérantes. Sept-Épées s’imagina que Tonine avait pu avoir un intérêt grave, tout différent d’un intérêt de cœur, à le rappeler auprès d’elle. Pourquoi n’avait-elle pas osé lui écrire elle-même ? Pourquoi avoir employé Lise à l’insu de son mari et du vieux parrain ? Et ces mensonges gratuits qu’on lui avait faits pour éprouver son dévouement, la maladie, la misère, la laideur même ? ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎
George Sand, La Confession d’une jeune fille (1865) “ Devant cette impatience, ma grand’mère se tourmenta de nouveau pour lui du choix d’un état. On a encore chez nous, dans certaines familles nobles, des préjugés contre le commerce, l’industrie et la plupart des professions libérales. Un jeune homme de bonne maison, sans fortune, ne peut être que marin ou militaire ; mais, pour être militaire, c’est-à-dire officier d’emblée, comme l’entendait Marius, c’était toujours la même impasse, et ma bonne maman, connaissant la hauteur et les raffinements de son neveu, n’osait pas lui proposer de se faire mousse ou soldat. ” [↩︎] Source : Wikisource ▶︎